La langue dans laquelle ils ecrivent n'est-elle pour les philosophes que
l'instrument indispensable, mais indifferent, de la communication de
leurs pensees? Ce pourrait etre le cas, s'ils n'etaient exposes, a
chaque pas, au caractere particulier de cette langue, et s'ils ne
devaient inventer des stategies diverses pour l'affronter, comme, par
exemple, leur enracinement avere et declare dans une culture, voire dans
un sol determine, devenu patrie de la philosophie - mais tout aussi bien
le parti-pris de la traduction, de la desappropriation de la langue, et
meme de la culture, dans ce qu'elles ont de national. Or quelles que
soient ces strategies opposees, elles investissent toutes le rapport a
la langue, aux langues ou au langage d'une promesse eschatologique.
C'est de la langue que vient le malheur, mais c'est aussi un autre
rapport au langage qui est source de salut, ou de redemption, voire de
revolution. C'est donc une autre philosophie du langage, qui se decouvre
a travers les oeuvres de Nieztsche, Kraus, Benjamin, Rosenzweig,
Heidegger ou Derrida, une philosophie qui n'est exempte de
considerations theologiques et politiques. Qu'attend-on des langues? Au
fil conducteur de la promesse, c'est a cette question que les etudes qui
composent le present volume entendent reconduire.