La Passion selon saint Matthieu est a la fois une oeuvre liturgique et
un spectacle d'opera. On etudie ici les consequences philosophiques
d'une telle affirmation. On se demande notamment si ceux qui viennent
entendre la Passion font une communaute de fideles ou une foule de
spectateurs, et quelle est la nature d'une communaute forgee
conjointement a coup de chorals et d'arias. Une telle interrogation sur
la nature du commun demandera de denouer le rapport tisse dans l'oeuvre
entre le Salut et le merveilleux d'un cote, la joie et le plaisir de
l'autre. On verra alors que si J.-S. Bach mele intimement les elements
du culte avec ceux de l'opera, c'est pour remplir une fonction
metaphysique qui est peut-etre aujourd'hui celle de tout spectacle:
produire, a l'aide de machines, le corps glorieux de la theologie
chretienne.