Cet ouvrage porte sur l'auto-comprehension de l'homme moderne dans son
rapport a la dimension de l'animalite. L'auteur part du statut paradoxal
des discours philosophiques de la Renaissance et de l'Age Classique sur
la nature des animaux. Ce caractere paradoxal a ete bien caracterise par
Pierre Bayle qui, dans l'article Pereira de son Dictionnaire, place son
lecteur devant une alternative inconfortable entre les deux positions
extremes que sont l'opinion tres dangereuse de Montaigne (qui affirme la
superiorite des animaux sur les hommes) et l'opinion absurde de
Descartes (celle des animaux-machines). L'auteur propose une analyse
minutieuse des deux textes seminaux que sont l'Apologie de Raimond
Sebond de Montaigne et la cinquieme partie du Discours de la methode de
Descartes, en s'attachant tout particulierement aux deplacements operes
dans ces textes sur le fonds legue par la litterature zoologique
antique, d'Aristote a Pline, Plutarque et Elien. Il montre ainsi le lien
des paradoxes du discours zoologique des Modernes a un paradoxe
philosophique plus fondamental par lequel l'anthropologie moderne se
trouve degagee des ontologies scalaires traditionnelles pour constituer
une champ autonome d'investigation. Cette liberation a une consequence
importante pour les temps modernes: l'unite de l'homme n'est plus donnee
dans un ordre predefini de l'etre, mais constitue une tache que l'homme
doit accomplir, a la fois sur le plan ethique et sur le plan technique,
en affrontant, dans une perspective d'immanence, le dualisme de la vie
et de la pensee, du biologique et du noetique.