L'esprit revait, le monde etait son reve. Comme un dieu en la terre,
l'homme de la Seconde Renaissance rivalisait de ses prouesses techniques
avec le Createur. Vinci, au Clos Luce, temoignait, en ses derniers feux,
de cette inventivite. Manquait encore un philosophe capable de rendre
raison de cette audace prometheenne. Ce fut Bovelles. Le rationalisme
naissant pose la convertibilite du rationnel et du reel. Esprit et
Nature, figures en miroir, s'entrexpriment de part et d'autre du
diaphane, en lequel subsiste cette matiere tutelaire qui les empeche de
se confondre. La tentation idealiste conjuree, la pensee est en mal de
justification. Comment la mens humana pourrait-elle se saisir de la
raison propre des choses? En faire une simple approximation de la mens
divina ne satisfait pas Bovelles, qui tente une deduction
transcendantale avant la lettre des categories de l'entendement. Par un
deplacement de chaque chose, sise en son lieu, au lieu de nulle chose,
Bovelles ouvre le champ de la representation, qu'il ne centre sur le
sujet pensant que pour ordonner ce dernier au premier principe de toutes
choses. Ne s'agit-il pas de voir le monde de l'oeil meme de Dieu?